Sonnet

 

 

Tout homme n’est pas né pour les sentiers faciles,

Pour le monde de l’homme à tous les pas ouverts ;

Il en est que Dieu fit pour rester au désert,

Qui n’aiment que l’air libre et les sentiers stériles.

 

Comme l’âme sauvage, ils méprisent les villes ;

Le torrent les abreuve, et les bois, au toit vert,

Sont, avec le ciel vif, leur unique couvert ;

L’ombre d’un joug répugne à leurs fronts indociles.

 

Arrêtés tout le jour sur le sommet d’un mont,

Ils ruminent en paix leur tristesse farouche,

Et les hommes de loin demandent ce qu’ils font.

 

Mais le Seigneur a dit : Malheur à qui les touche !

Leur exil m’appartient, inutile ou fécond,

Et c’est moi qui du mors ai délivré leur bouche.

 

 

 

Ferdinand de GRAMONT.

 

Recueilli dans Souvenirs poétiques de l’école romantique, 1843.

 

 

 

 

 

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